L’Algérie, vers un tourisme « Arc-en-ciel » !

L’Algérie, vers un tourisme « Arc-en-ciel » !

République algérienne démocratique et populaire
Des sites archéologiques ont révélé des traces d’hominidés datant de près de deux millions d’années. L’Algérie, en raison de sa tradition de terre d’accueil et les multiples civilisations qui l’ont traversée, a hérité d’une histoire très riche.
À partir de 1830, le gouvernement de Charles X, entreprend la conquête, violente, méthodique du territoire algérien jusqu’à aboutir sous la Deuxième République, en 1848, à la mise en place de trois départements français. Après plus d’un siècle de colonisation française, à l’issue d’une guerre d’indépendance longue et meurtrière (un million et demi de morts côté algérien) et à la suite du référendum d’autodétermination du 1er juillet 1962, l’Algérie proclame son indépendance le 5 juillet 1962.
La Constitution algérienne définit « l’islam, l’arabité et l’amazighité » comme « composantes fondamentales » de l’identité du peuple algérien et le pays comme « terre d’Islam, partie intégrante du Maghreb, pays arabe, méditerranéen et africain ». Devise nationale : par le peuple et pour le peuple.
La population algérienne résidente s’élève à près de 45 millions d’habitants avec un taux d’urbanisation de 75 %. D’une superficie de 2,38 millions de kilomètres carrés, il s’agit du 10ème plus grand pays au monde ; le plus étendu d’Afrique.
Les Algériens descendent principalement des Berbères et environ 90 % d’entre eux vivent sur un peu plus de 10 % du territoire, concentrés le long des côtes méditerranéennes. En 2010, la société algérienne est en majorité composée de jeunes : 37 % de 0 à 19 ans et 33 % de 20 à 39 ans.
L’arabe est langue nationale et officielle, tout comme le tamazight. L’arabe algérien et une langue véhiculaire, le français est couramment parlé, surtout en milieu urbain, mais des décisions politiques tendent à le rendre secondaire au profit de l’anglais (dernièrement le gouvernement interdit que l’enseignement dans les établissements privés puisse se dérouler en français).
S’il n’existe pas de recensement officiel en matière de religion, il est généralement estimé que l’islam est la religion de 98 à 99 % des Algériens. En 2018, le taux d’alphabétisation (population âgée de 15 ans et plus) est selon l’Unesco de 81 % (87 % de la population masculine, 75 % de la population féminine).
4ème économie africaine (après le Nigéria, l’Egypte et l’Afrique du Sud), l’Algérie est riche en gisements pétroliers et gaz naturel ; l’activité minière est également très diversifiée : fer, sel, zinc, plomb, barytine, marbre, or, tungstène, diamant, etc. Son PIB par habitant s’élève, en 2018, à 4 081 $ (France 43 035 $).

Paysans du Monde
L’association Paysans du Monde est créée en 2021 par d’anciens responsables d’Accueil Paysans, les responsables actuels se focalisant sur la France et n’ayant guère d’investissement pour l’étranger. Des contacts sont déjà établis au Maroc, Brésil, Togo, Colombie, Russie… et en Algérie.
« Les fondateurs pratiquent une agriculture paysanne agroécologique, respectueuse de l’environnement et des consommateurs, tout en développant diverses formes d’accueils sur leur ferme, accessibles au plus grand nombre. Ils sont engagés dans la promotion du tourisme équitable et solidaire… Nous avons accompagné et soutenu des projets paysans dans de nombreux pays et c’est bien l’idéal que l’on se fixe, maintenir les paysans sur leur territoire et de créer un réseau international paysan. Paysans du Monde se veut porteur d’espérance pour tous les paysans et les humains de cette planète. »
Sa charte apporte des précisions (extraits) : « Paysans du monde du monde réunit des paysans actifs et retraités qui accueillent et hébergent sur leur ferme, en séjours ou en circuits dans tous les pays du monde “pour rester vivre sur leur lieu de vie”… Ils proposent des produits issus de la ferme en agroécologie à leur table ou sous diverses formes de vente se rapprochant des consommateurs… Paysans du monde fait partie de l’économie sociale et solidaire et se réfère par son fonctionnement et sa recherche au mouvement d’éducation populaire… Paysans du monde défend une agriculture durable et familiale où l’humain est au cœur des projets. La pratique de l’accueil sur les lieux de vie permet au paysan comme à l’accueilli, dans le respect de leur culture respective, de construire une humanité plus solidaire entre les peuples.

Un « Arc-en-Ciel algérien »
A l’automne 2022, après de fructueux contacts, Paysans du Monde labélise huit lieux d’hébergement en Algérie, principalement en Kabylie, accompagnés par l’association Arc-en ciel et Rachid son président. Première étape dans le pays pour faire reconnaître de plein droit le tourisme rural. L’association s’active auprès du Ministère du Tourisme et de l’Artisanat pour qu’une délégation française participe au 22ème Salon International du Tourisme et des Voyages (SITEV), car « ce salon vise à mettre en valeur les initiatives développées en Algérie dans le secteur du tourisme, qui peut devenir prédominant dans le cadre de la diversification de l’économie nationale permettant ainsi la valorisation de l’ensemble des acteurs locaux » soulignent ses organisateurs. Plus de 300 exposants, 30 pays représentés (dont des délégations chinoise, russe, turque, sénégalaise, polonaise, etc.), 80 000 personnes attendues.

Notre délégation se compose d’une triple représentation : l’Association pour le Tourisme Équitable et Solidaire (ATES), le Réseau DéPart (regroupement de voyagistes rhônalpins) et Paysans du Monde.
L’objectif est de sensibiliser les plus hautes autorités du Ministère de l’intérêt que revêt le tourisme de proximité, le tourisme rural, qui, s’il n’est pas d’un apport essentiel en termes de devises (mais offre un complément de ressources aux hébergeurs), favorise la rencontre, les échanges, la connaissance des réalités du milieu agricole, le développement de projets locaux et s’inscrit donc dans un esprit de fraternité. Le label apporté par Paysans du Monde garantit la qualité des conditions d’accueil des hébergeurs, tout en les inscrivant dans un réseau international.

Au-delà de la tenue d’un stand commun à Arc-en-Ciel et aux trois associations françaises qui permit de très nombreux contacts, échanges, une rencontre avec le Ministre, etc., le Ministère, par l’intermédiaire de l’Office National Algérien du Tourisme (ONAT), entreprise d’État, a concocté un circuit « sur la route des ksours » pour les délégations étrangères. Il nous amène à visiter un échantillon des pépites historiques et culturelles de ce pays à la population si attachante, où le geste d’accueil se présente sous forme de dattes et d’un verre de lait : Alger, Ghardaïa, El Golea et Timimoun.
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Alger… et sa casbah
Fondée au IVe siècle av. J.-C., comme comptoir phénicien en pays berbère, sous le nom d’Ikosim, Alger fut occupée par différents peuples (Romains, Vandales, Byzantins, Arabes, Berbères). À l’arrivée des Français en 1830, la médina d’Alger était une ville fortifiée qui correspond au territoire de la casbah actuelle. Sous le régime colonial, la vieille ville et la ville européenne constituèrent la Ville d’Alger, créée en 1832. La population d’Alger était d’environ 100 000 habitants au XVIIème siècle, aurait décliné jusqu’à 30 000 habitants en 1830. Aujourd’hui elle atteint environ 3 800 000 habitants, dont près un tiers a moins de 20 ans.
La capitale est en pleine expansion, motivée par un besoin d’affirmation au niveau régional dans sa lutte pour concurrencer les autres villes nord-africaines de Tunisie et du Maroc. Alger est une ville ouverte où cohabitent le front de mer, un centre qui s’étend de la Grande Poste jusqu’au palais du Peuple, la grande Mosquée (la troisième plus grande du monde, d’une capacité d’accueil de 120 000 fidèles), la basilique Notre-Dame d’Afrique (sur le promontoire qui domine le quartier de Bab El Oued), le Jardin d’Essai du Hamma qui s’étend sur 32 hectares, le port qui joue un rôle fondamental dans le développement économique du pays, etc. Pour accélérer son développement et relier le centre à sa banlieue, les transports en commun se sont diversifiés : métro, téléphériques, trains de banlieue, autobus, etc.
La casbah (« la Citadelle »), surnommée Al-Djazaïr al Mahroussa (« Alger la Bien Gardée »), est fondée sur les ruines de l’ancienne Icosium. Probablement peuplée dès le néolithique, les premières mentions de la ville remontent à l’Antiquité, où elle est d’abord un port punique, puis berbère et enfin romain. Elle correspond à la vieille ville ou médina dont elle forme un quartier historique.

Colonisée par les Français, elle est progressivement marginalisée car les centres de pouvoir sont déplacés vers la nouvelle ville. Elle occupe un rôle central pendant la guerre d’Algérie, servant de bastion aux indépendantistes du FLN et fut le lieu principal de la bataille d’Alger en 1957. À l’indépendance du pays, en 1962, elle ne retrouve pas son rôle central et redevient un espace marginalisé de la ville.
Petite ville, qui, construite sur une colline, descend vers la mer, divisée en deux : la ville Haute et la ville Basse. On y trouve des bâtisses et des mosquées du XVIIème siècle, le décor d’un enchevêtrement de maisons construites sur une pente, une suite de labyrinthes de ruelles et de maisons pittoresques. L’étroitesse et la sinuosité de ses rues en font une zone sans voitures, dont le ravitaillement ou le ramassage des ordures se fait encore traditionnellement à dos d’âne. La Casbah est un exemple d’habitat humain traditionnel représentatif de la culture musulmane méditerranéenne. Les plans de restaurations se succèdent, sans succès, par manque de volonté politique. La Casbah, quartier vétuste, reste aux yeux de la population algérienne, un symbole de la lutte contre les injustices et un lieu de mémoire collective. L’Unesco la classe au patrimoine mondial de l’humanité en 1992.

Ghardaïa située à 600 km au sud d’Alger. La vieille ville (et le reste de la vallée du Mzab), est classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco depuis 1982. Fondée au Xième siècle par les ibadites.
Selon la légende, Ghardaïa, signifie « Grotte de Daïa » (Ghar Daïa), on raconte qu’une jeune fille du nom de Daïa vivait seule dans une grotte. Le cheikh Sidi Bou Gdemma passant par là, est séduit par sa beauté, ils se marient et ils fondent alors Ghardaïa.
Ghardaïa est une ville composite qui comprend une communauté mozabite, une population berbère et une forte minorité arabe. Son agglomération compte environ 140 000 habitants. Située sur l’axe du méridien d’Alger, qui est une pénétrante idéale vers le Sud, Ghardaïa, après avoir été un relais du commerce caravanier transsaharien est devenu une ville commerciale et industrielle dynamique, plaque tournante des échanges entre le nord et le sud du pays. L’urbanisation s’est établie par la reproduction du modèle du ksar avec la palmeraie.

El Golea (officiellement devenue « El Menia » mais les habitants et les autorités peinent à intégrer cette nouvelle appellation) est situé à près de 300 kilomètres au sud-ouest de Ghardaïa. El Golea est la déformation du nom El-Kalaa, un mot arabe qui signifie la « forteresse ». El-Menia signifie imprenable, inviolable.
Son climat est désertique et chaud, avec de longs étés (les 50° sont parfois atteints) et des hivers courts et chauds. Selon le recensement la ville compte 40 000 habitants.
Le vieux ksar d’El Golea, construit au Xème siècle par les Berbères Zénètes classé au patrimoine national depuis 1995, est bâti sur une colline de forme pyramidale qui domine toute la palmeraie (aux 333 variétés de dattes !). La ville abrite l’église Saint-Joseph, surnommée la « Cathédrale du désert » près de laquelle se situe la tombe de Charles de Foucauld, père missionnaire, mort en 1916.

Timimoun, surnommée « l’oasis rouge » pour sa couleur ocre, fait figure de capitale administrative du Gourara depuis le début du XXème siècle. Timimoun est la forme berbérisée de l’arabe, maymun, « heureux », et signifierait « l’Heureuse ». Des œuvres rupestres témoignent d’une occupation humaine de la région dès la préhistoire. Selon les récits oraux, la fondation de la ville de Timimoun remonterait au XIIIe siècle.
Le village, dominé par un vieux ksar, surplombe la palmeraie et qui ouvre sur le bassin sédimentaire de la Sebkha, offrant un panorama sur la partie méridionale du Grand Erg Occidental. La ville a connu une urbanisation rapide depuis les années 1950, passant d’une petite bourgade saharienne à une agglomération urbaine. Selon le dernier recensement sa population est évaluée à 33 000 habitants… soit onze fois plus qu’en 1954 ! La ville moderne est arabophone, tandis que l’ancien ksar est habité par des Zénètes berbérophones

Vers demain…
Le travail en commun entre les associations Arc-en-Ciel et Paysans du Monde contribue à faire tomber des barrières (mentales, invisibles), donne de la densité à la rencontre, enrichit le lien par la découverte culturelle, la connaissance du patrimoine et des réalités historiques. Mains tendues, passerelles à travers les frontières dans une relation encore marquée par le colonialisme, une histoire riche et douloureuse, nos deux Peuples, chacun d’un coté de la Méditerranée, s’inscrivent dans « un cousinage » : un ensoleillement dans le ciel, mais aussi dans les têtes et les cœurs.